Écouter la conférence de MmeLagarde n’a pas permis de faire retomber notre sidération depuis notre réaction immédiate à l’annonce d’une remontée des taux directeurs de 50 points de base par la BCE, bien au contraire. La référence incessante à la période à laquelle a été bouclé leur scénario, il y a plus d’un mois!, comme une excuse sur le fait de ne pas avoir intégré les conséquences de la crise bancaire en présence, est, non seulement, stupéfiante mais particulièrement inquiétante sur ce qu’elle nous dit de la réactivité de l’Institution. Est-ce la raison pour laquelle l’euro ne profite même pas de la nouvelle sur les taux? Il s’agit, en tout cas, d’une source de préoccupation fondamentale que l’on est, peut-être naïvement, tenté d’expliquer par un jeu tactique de la part de la BCE. Si, pour l’instant, la stratégie paraît gagnante, au vu, en tout cas de la réaction des bourses, qui semblent prendre pour argent comptant la confiance affichée par la présidente de la BCE, tout incite à être particulièrement prudent quant au risque d’effet boomerang à venir.
Tout va bien!
C’est sans doute le message que souhaitaient recevoir les marchés et celui que Mme Lagarde a voulu envoyer: si l’institution se permet de relever ses taux de 50 pb, c’est sans doute que la situation est maîtrisée, en effet, et que la BCE ne s’inquiète guère des risques de propagation associés à la crise bancaire en présence. MmeLagarde est apparue confiante sur la solidité des bilans bancaires, en effet, assurant que la situation n’était pas celle de 2008 (quand son prédécesseur avait relevé le niveau des taux directeurs en juillet...) et laissant penser que la crise qui affecte les banques américaines est spécifique aux établissements concernés (comme les «subprimes»?).
Que ce soit ce que les marchés avaient envie d’entendre est une chose, que sa décision et son approche soient défendables en est une autre. La fragilité du système financier n’est plus à démontrer et bien malin qui peut dire quelle étincelle pourrait être susceptible d’allumer un incendie. La décision de la BCE, quoi qu’elle implique comme réaction immédiate des marchés, est malvenue et, du reste, assez mal justifiée.
L’inflation trop haute mais en voie d’être maîtrisée
En l’occurrence, le discours de MmeLagarde mentionne de nombreux éléments, plutôt, rassurants sur les perspectives d’inflation: les propres prévisions de la BCE, révisées à la baisse, malgré une timide remontée du scénario sous-jacent; la décélération du crédit aux entreprises et aux ménages dont la hausse des coûts impacte tout à la fois l’offre et la demande; les tensions financières en présence. Il ne dit rien, d’ailleurs, sur la politique à venir, ni sur l’évolution probable des taux d’intérêt directeurs, qui seront fonction du flux des données économiques, ni sur ses intentions en matière de bilan.
On devine qu’un certain nombre de membres récemment échaudés par les mauvais résultats de l’inflation ont dominé cette prise de décision, à certains égards, plus facile à appliquer que de défaire une partie du discours antérieur. Rien n’empêche cependant de penser que cette hausse des taux directeurs pourrait être la dernière. De fait, les anticipations de taux évoluent peu. Toujours sous le coup des tensions en place, les taux à 2 ans, légèrement au-dessus de 2,50% cet après-midi, restent inférieurs à leur niveau de la matinée.