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Quand Greg Smith démissionne avec fracas de Goldman Sachs

Publiée dans le NY Times Mardi 14 Mars dernier, la lettre de démission écrite par Greg Smith, le désormais ex-responsable des produits dérivés pour l’Europe, le Moyen Orient et l’Afrique et ex-directeur exécutif de Goldman Sachs, jette une fois de plus l’opprobre sur les banquiers de Wall Street...

Après douze ans de loyaux services, Greg Smith, Sud Africain d’origine et diplômé de l’Université de Stanford, a donc choisi de démissionner avec fracas. Et en choisissant de dévoiler publiquement les raisons qui l’ont poussé à quitter Goldman Sachs, le banquier a évidemment pris le parti d’égratigner son ex employeur.

Pour Greg Smith, «l’environnement [chez Goldman Sachs] n’a jamais été aussi toxique et destructeur». La culture de l’intégrité, l’esprit d’équipe, l’orientation clients et l’esprit d’humilité, qui ont donné ses lettres de noblesse à la banque et lui ont permis d’avoir la confiance de nombreux clients depuis 143 ans, ont été sacrifiés sur l’autel de l’argent et de la rentabilité à tout va.

La banque, toujours selon l’ex employé de Goldman, avait complètement évolué dans sa manière d’aborder le leadership: les promotions se faisaient désormais au gré des flux monétaires que l’on faisait rentrer dans la banque, indépendamment de la manière, et même si cela se faisait au dépens des clients.

Greg Smith affirme aussi, toujours dans cette longue lettre, avoir participé à de nombreux meetings avec des vendeurs de produits dérivés où «il n y avait même pas une minute consacrée à la place que la banque pouvait jouer pour répondre aux besoins des clients» et que cela le rendait malade de voir autant de «gens cyniques penser à comment ils allaient arnaquer leur clientèle».

L’ex employé termine sa missive en souhaitant qu’elle constitue «un signal d’alarme à destination de ses dirigeants», que Goldman Sachs remette les clients au centre de ses préoccupations et que la banque retrouve sa culture d’antan, celle pour laquelle tant de gens voulaient travailler avec elle.

«Les gens qui ne s’intéressent uniquement qu’à l’argent ne pourront pas soutenir cette compagnie - ou les clients qui lui font confiance – de manière durable.», conclut-il finalement, sous forme d’avertissement.

Cette lettre revient donc mettre en lumière des comportements discutables et les travers souvent reprochés, de l’extérieur, à la banque d’investissement américaine, déjà indexée dans quelques affaires depuis la crise des subprimes (démêlés avec la SEC suite à des accusations de fraude, l’affaire Abacus du nom d’un produit «toxique» conçu par un ingénieur financier français ou encore la polémique sur les conseils prodigués au gouvernement grec pour maquiller son niveau d’endettement).

Les réactions à cette sortie médiatique ont cependant été mitigées du côté des professionnels et de la presse spécialisée. Certains voyant chez Smith, si ce n’est l’expression d’une frustration de n’avoir pas pu évoluer sereinement au sein de la banque, un sursaut de naïveté. Car peut-on penser que quelqu’un qui a travaillé pendant 12 ans, à des postes de responsabilité, au sein d’une institution impliquée dans nombre d’affaires allant à l’encontre de l’éthique, en soit étonné aujourd’hui qu’il soit d’abord question de rentabilité chez Goldman Sachs comme dans beaucoup d’autre banques d’investissement? La culture de Goldman Sachs a-t-elle seulement changé récemment?

La sortie de Greg Smith va dans tous les cas piétiner la réputation déjà sensiblement écornée de la banque d’investissement américaine auprès de l’opinion publique et elle participera, dans un sens, à exacerber les rancœurs futures vis-à-vis des banquiers de Wall Street, de la City et d’ailleurs. Mais la réalité est que cette tribune n’est qu’une succession de banalités déjà bien ancrées, à juste titre, dans les esprits. Goldman Sachs ou le culte de l’argent n’est certainement pas une nouveauté.

Maxime Onan Mars 2012
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