Habitués à prendre des positions sur la volatilité, à travers des strangles 80-120 sur indice actions, les traders de la Caisse Nationale des Caisses d’Epargne avaient opéré sans incident majeur durant ces dernières années.
Pourtant, après une analyse du ratio risque-rendement du desk compte propre, Julien Carmona, membre du directoire chargé des finances et des risques, décide de mettre fin en avril 2008, à cette activité.
Le trading compte propre n’a alors plus pour mission que la gestion extinctive des positions en portefeuille jusqu’en fin 2008.
Le 6 octobre, flairant une opportunité de marché, l’un des trois traders chargé des produits dérivés anticipe un rebond du marché et une baisse de la volatilité après l’annonce de l’adoption du plan Paulson.
Selon lui, les indices de volatilité du type V2X ( indice de volatilité de l’Euro Stoxx 50) ont atteint un pic à 45% alors qu’ils évoluaient dans un range de 20-30% quelques semaines auparavant.
Il prend alors des positions vendeuses sur ces indices de volatilité.
Sa couverture ne résiste pas au retournement du marché et au krach de cette semaine historique. Sa position "short" le laisse à la merci du rallye sur les indices de volatilité qui atteignent même les 70%.
Dépassé par ce krach historique, le trader abdique et décide de poser sa démission le 13 octobre.
La direction de la Caisse d’Epargne comprend alors la gravité de la situation mais le mal est déjà fait. Le trader est parti et la position n’a pas été coupée, son book affiche 100 millions d’euros de pertes en marked to market.
Le 16 octobre, les pertes avoisinent les 400 millions d’euros. La direction du groupe essaie alors de couper sa position. Celles ci étant illiquides et de gré à gré, il faut de toute urgence «netter» la position face à la contrepartie. Qui est-elle? Société Générale? Un autre opérateur? Les questions restent posées.
Toujours est-il que les Caisses d’Epargne vont alors s’adresser à l’un des spécialistes mondiaux des dérivés actions: BNP Paribas.
Malheureusement pour les Caisses d’Epargne, dans un cas comme dans l’autre, le «netting» des positions ne se fera qu’aux prix proposés par ces contreparties, avec une fourchette très large et très éloignée du mid market.
Obligée de couper la position, la direction de la Caisse d’Epargne n’a pas le choix. Elle sort de ses positions aux prix proposés par ses concurrentes.
Selon le NouvelObs, la somme perdue par la gestion pour compte propre se rapproche plutôt de 700 millions d’euros.
La direction de BNP-Paribas a tenu à préciser qu’elle avait pris des positions «hedgées», et affirme n’avoir gagné tout au plus «que» 4 ou 5 millions d’euros de marge sur cette opération.
Ce n’est pas un coup d’essai pour la BNP Paribas, qui s’était déjà portée acquéreuse du portefeuille de produits structurés actions du Crédit Industriel et Commercial (CIC) en 2005 avant que celui ne cesse toute activité de ce type pour compte propre.