En effet, les suites de la rencontre entre les deux chefs d’Etat à Pékin en avril ont apaisé les pires craintes suscitées par la rhétorique protectionniste et la posture agressive de Donald Trump pendant sa campagne. A peine un mois plus tard, un train de mesures en 10 points a été annoncé en prélude à un plan d’action de 100 jours destiné à renouveler la coopération commerciale entre les deux pays.[1]
Certaines positions concédées par la Chine (comme l’accord d’ouverture de son marché aux agences de notation et aux organismes de paiement américains) ont été critiquées car elles seraient le fruit de décisions déjà prises antérieurement. Néanmoins, l’engagement de la Chine à reprendre les importations de boeuf depuis les Etats-Unis et à accélérer le processus d’approbation des semences génétiquement modifiées constitue une avancée prometteuse, de même que la volonté affichée par Washington d’encourager les exportations de gaz naturel liquéfié vers la Chine, d’autoriser les importations de volaille cuite et d’allonger de six mois la «période de tolérance» accordée à la Shanghai Clearing House pour l’absence d’enregistrement d’opérations sur des produits dérivés auprès des autorités américaines.[2]
Ces signes dénotant plus de coopération que de confrontation devraient encourager les investisseurs et stimuler les flux d’investissement directs et de portefeuilles transfrontaliers entre les deux plus grandes économies mondiales, bien qu’il soit encore difficile de désigner clairement qui bénéficie ou non des déclarations faites à l’issue de cet entretien. Donald Trump a même semblé approuver le projet «One Belt, One Road» de son homologue chinois, considéré jusqu’alors comme une menace pour les intérêts stratégiques américains, en envoyant, le 13 mai, une délégation à un sommet majeur dédié à ce plan se tenant à Pékin.
La possibilité d’un dialogue constructif entre les deux chefs d’Etat devrait également contribuer à limiter le scénario de risques baissiers sur le front géopolitique. Et c’est un constat important à l’heure où la Corée du Nord cherche à concrétiser son ambition nucléaire, à laquelle a réagi la Corée du Sud en déployant le système de missiles américain THAAD, au grand déplaisir de la Chine.
L’entente affichée de Xi Jinping et Donald Trump établit également un juste équilibre dans le cadre de la concurrence géopolitique accrue que se livrent les deux superpuissances, en particulier après le revirement récent du président philippin Rodrigo Duterte en faveur de Pékin.
PERSPECTIVES DE CROISSANCE STABILISÉES
Or, ces événements surviennent dans un contexte où les craintes suscitées par la Chine commencent à se dissiper sur les marchés. La rétrogradation de la note de crédit de la Chine par Moody’s, de Aa3 à A1, n’a eu presque aucun effet sur le cours des actions locales, qui intègrent depuis plusieurs années déjà les inquiétudes entourant le système bancaire parallèle et les craintes liées à la croissance rapide des niveaux d’endettement.
Certes, l’économie chinoise a ses problèmes et les investisseurs internationaux qui s’exposent à ce marché rencontrent des risques, entre autres de gouvernance et de transparence. Des incertitudes règnent également concernant l’action des autorités de réglementation, dont les tentatives pour éviter l’effondrement des marchés pendant l’été 2015 restent gravées dans les mémoires comme un événement troublant.
D’un autre côté, la Chine dispose d’une classe moyenne en plein essor qui va continuer à grandir pendant les dix prochaines années, et son économie est dotée d’un haut taux d’épargne et d’investissement, sans parler d’une croissance du PIB qui va vraisemblablement dépasser les prévisions de quelque 6,5% pour la seconde année consécutive. Les dernières statistiques économiques dépeignent une économie toujours en bonne voie pour réussir son atterrissage en douceur, et pour couronner le tout, il est possible que les bénéfices des entreprises soient encore révisés à la hausse au cours des 12 prochains mois.
UN MARCHÉ EN MUTATION
Les deux valeurs les plus importantes dans l’indice MSCI China sont désormais Tencent et Alibaba, dont la pondération cumulée atteint près de 28% (source: Bloomberg, au 29 juin 2017). En réalité, les valeurs dites «de la nouvelle économie» représentent déjà presque 40% de l’Indice. Cette transformation s’opère depuis cinq ans déjà et doit inciter les investisseurs à ne plus considérer les actions chinoises sous l’angle des mêmes schémas de risque. Ce nouvel indice, plus large et «dynamisé», ainsi que les politiques publiques désormais davantage axées sur la pérennité de la croissance vont probablement entraîner une révision à la baisse des perceptions du risque.
Malgré des anticipations de croissance des BPA d’environ 12-13% par an pendant les trois prochaines années, l’indice MSCI China se négocie toujours à 13,5x pour 2017, un niveau qui tombe à 10,5x pour 2019 (source: Bloomberg, au 29 juin 2017). Ces niveaux de valorisation offrent un grand potentiel de prolongement du rebond actuel du marché, sous l’effet à la fois de la croissance et d’une possible réévaluation.
«Les investisseurs internationaux ont maintenant plus d’opportunités de bénéficier de la montée en puissance de la Chine. Tant que l’entente apparente entre Trump et Xi se maintient, la confiance des investisseurs devrait s’accroître, les poussant à renforcer leur allocation aux valeurs chinoises ainsi qu’aux secteurs de la «nouvelle économie» de l’Empire du Milieu.»