Les dernières statistiques économiques relatives à la zone euro ont été nettement inférieures aux attentes et le risque de récession s’est accru.
Toutefois, les pressions baissières sur l’activité économique n’ont pas été suffisamment importantes pour justifier l’ampleur d’un tel décrochage sur les marchés d’actions.
Cela tend à indiquer qu’une multitude d’autres facteurs ont une incidence disproportionnée, ce qui offre selon nous un point d’entrée intéressant aux investisseurs en quête d’opportunités.
Si l’on s’intéresse aux fondamentaux économiques en Europe, le risque que l’inflation, toujours aussi faible, entraîne une véritable situation déflationniste n’est pas nouveau. Selon nous, rien ne montre que le risque de déflation a augmenté. Bien que les prévisions de PIB du consensus aient légèrement diminué, les indicateurs avancés demeurent positifs et les anticipations d’inflation n’ont guère évolué. Mario Draghi, le président de la Banque centrale européenne, a annoncé diverses mesures pour assouplir les conditions de crédit dans la zone euro mais elles n’ont pas encore été entièrement mises en oeuvre, en raison notamment de l’examen de la qualité des actifs (AQR) et des stress tests bancaires. Les résultats de cet examen de la santé de banques seront connus très bientôt, ce qui devrait encourager les banques à prêter et à poursuivre leurs activités quotidiennes, plutôt que de s’inquiéter de la situation de leurs fonds propres.
En outre, si les forces déflationnistes s’accentuent très fortement, il est fort probable qu’un plan d’assouplissement quantitatif soit déployé en Europe.
L’importance de ce plan pour les actions européennes doit être envisagée avec le recul de l’expérience américaine.
L’indice S&P500 a connu une très forte progression lors du déploiement des trois plans d’assouplissement quantitatif de la Fed. Immédiatement après le premier et le deuxième, l’indice S&P avait subi de plein fouet le retrait de liquidité et avait fortement décroché. C’est précisément ce que nous observons aujourd’hui avec la suspension du troisième plan intervenue au début du mois d’octobre.
Naturellement, d’autres facteurs pèsent actuellement sur le sentiment des marchés. Il est encore impossible d’évaluer l’impact du virus Ebola, mais l’histoire montre que les marchés ont généralement tendance à réagir très vite à ce type de situation. Les gouvernements prennent des mesures pour répondre à la tragédie humaine et cette réponse s’intensifie lorsque la menace d’une déstabilisation mondiale fait son apparition. Il ne sert à rien de comparer la gravité de la situation actuelle avec les épidémies et les pandémies du passé, mais les dernières informations tendent à montrer que le virus peut être endigué si une réponse mondiale est mise en place.
Autre motif d’inquiétude, la chute de 25% du prix du pétrole. Les dynamiques d’offre et de demande sont en cause. Le ralentissement simultané des économies européenne et chinoise entraîne inévitablement une baisse de la demande en barils. L’évolution structurelle des États-Unis vers l’autosuffisance énergétique aura à coup sûr des répercussions sur un secteur longtemps dominé par un cartel. L’OPEP a décidé d’étouffer les producteurs américains de pétrole de schiste pour assurer la pérennité du cartel. Pour les sociétés cotées, ces coûts des matières premières ont sensiblement baissé dans de nombreux secteurs d’activité.
Pour le secteur du voyage par exemple, dans un environnement normal, la rentabilité devrait être nettement améliorée par la baisse des prix du pétrole; mais la crainte d’un effondrement de la demande en voyage en raison de la propagation du virus Ebola a détourné les investisseurs de ce secteur.
Ces derniers mois, le secteur pharmaceutique a été rasséréné par les avantages induits par le phénomène de "tax-inversion" sur les opérations de fusion-acquisition aux Etats-Unis. Le retrait probable de l’offre de AbbVie pour racheter Shire montre à quel point les autorités américaines sont réticentes à l’idée d’autoriser les entreprises du pays à réaliser de telles opérations justifiées uniquement par des économies d’impôts. Les répercussions de la position américaine en la matière sont temporaires et certains cours de bourse finiront inévitablement par s’ajuster.
Nous ne voulons pas dire que l’horizon est complètement dégagé, simplement que plusieurs facteurs négatifs ayant influencé le sentiment des marchés durant le mouvement de correction sont par nature temporaires, ce qui peut créer des opportunités pour les investisseurs de long terme.
Nous considérons que le temps est venu pour l’Allemagne d’entrer en scène. Mario Draghi, le président de la BCE, déploie depuis quelque temps tous les outils à sa disposition pour assurer une relance monétaire (opérations de refinancement à long terme, achats d’ABS et probablement plan d’assouplissement quantitatif). Il a néanmoins précisé à plusieurs reprises qu’à elle seule la politique monétaire ne pouvait pas garantir une reprise économique soutenue en Europe sans la contribution des États capables de prendre des mesures budgétaires appropriées. L’insistance de l’Allemagne en matière d’équilibre budgétaire est très louable mais la locomotive économique européenne ne doit ignorer ni le cycle économique ni son rôle d’État membre clé de la zone euro. Nous pensons que la reprise en Europe sera lente et chaotique. L’Allemagne doit intervenir pour assurer la viabilité de cette reprise et assumer la responsabilité de la survive de la zone toute entière.