Premièrement, le prix de tous les actifs est tiré vers le bas quand les taux montent. Et plus la duration de ces actifs est longue, plus la baisse de prix sera conséquente. Il faut donc éviter les obligations à long terme ainsi que les actions dont le cash flow est faible sur les prochaines années.
Deuxièmement, la hausse des taux entraîne une rémunération plus attractive des liquidités. Là où cela coûtait de l’argent de détenir des liquidités, c’est maintenant une source de profits.
Troisièmement, une normalisation des taux implique un coût du capital plus élevé qui offre à nouveau un point d’ancrage pour les valorisations. Quand les taux sont à zéro voire négatifs, les motivations pour investir sont tellement fortes que le prix de certains actifs devient parfois aberrant. Avec des taux plus élevés, les raisonnements plus rationnels de valorisation absolue et relative entre deux actifs redeviennent pertinents.
Ces trois phénomènes expliquent pourquoi une stratégie long/short est idéale dans un environnement de normalisation des taux. Nous allons voir pourquoi mais avant il convient de présenter cette technique de gestion.
C’est une gestion qui a fait ses preuves depuis plusieurs décennies, le premier fonds Long/Short est réputé avoir été lancé par l’américain Alfred Jones en 1949. Si cette technique gestion existe depuis 70 ans c’est qu’elle a souvent fourni des performances attractives tout en amortissant en partie les grandes baisses de marché. L’originalité de cette stratégie est la suivante: acheter des actions («poche» acheteuse) tout en vendant d’autres actions à découvert («poche» vendeuse). Ainsi quand le marché actions baisse, la poche acheteuse peut être amortie par la baisse de la poche vendeuse qui engrange un profit. Le fonds long/short est donc beaucoup mieux placé que des fonds actions, obligataires ou immobiliers contre une baisse généralisée des actifs liées à une hausse des taux.
Ensuite, la performance attendue du fonds long/short bénéficie directement des taux qui montent. Les liquidités obtenues de la poche vendeuse sont rémunérées. Nos calculs montrent qu’un fonds long/short classique est indexé à 60% à la hausse des taux. C’est-à-dire que si les taux montent de 3% par exemple, la performance du fonds long/short augmente de 1.8%/an, toutes choses égales par ailleurs.
Enfin, le retour du point d’ancrage des valorisations est un élément fondamental de la raison d’être du fonds long/short. La stratégie du fonds est de sélectionner des actions «sous-valorisées» dans la poche acheteuse et d’identifier des valeurs survalorisées sur la poche vendeuse. A partir du moment où les taux sont à 0, l’investissement devient spéculatif et le «référentiel valorisation» disparaît. Les bulles financières se développent dans les segments qui ont temporairement la faveur des investisseurs. On l’a vu avec Tesla dont la capitalisation boursière a dépassé 1300 milliards de dollars, plus que tout le secteur automobile, alors que la rentabilité est encore incertaine. On l’a vu aussi dans le segment de la technologie, où toutes les valeurs sont montées exponentiellement, que les entreprises soient rentables et établies où qu’elles soient des startup sans aucune preuve de la pérennité de leur business model.
Les exemples similaires sont nombreux, ils montrent que cette politique de taux zéro a entrainé un dysfonctionnement de l’allocation du capital et de la juste évaluation du risque pris par rapport au rendement attendu. Pour fonctionner, le fonds long/short a besoin d’un environnement ou l’allocation du capital est rationnelle. Avec les taux qui remontent, le coût du capital se normalise et cette nécessaire rationalité dans les flux de capitaux revient.
Beaucoup de fonds long/short ont vécu des moments difficiles pendant cette décennie de taux zéro. Mais ceux qui ont su s’adapter retrouvent désormais des conditions très attractives pour faire de la performance. Cette stratégie de gestion est idéale dans l’environnement actuel.