En effet, si le rebond auquel nous assistons depuis mi-octobre est fondé sur des chiffres laissant augurer d’une accalmie, on peut néanmoins légitimement rester songeur.
Comme nous le mentionnions dans notre dernier rendez-vous du lundi, si les chiffres d’inflation aux États-Unis ont été plutôt positifs, le combat vers la cible des 2% n’est pas encore totalement gagné. Les membres du FOMC sont d’ailleurs là pour le rappeler (en espérant qu’ils n’aient pas la même clairvoyance que Cassandre), ce qui permet de «recalibrer» les attentes des investisseurs parfois un peu trop optimistes.
Ainsi, après une détente historique sur les emprunts d’État américains (respectivement -33 bps et -35 bps sur les 2 ans et 10 ans américains sur la semaine écoulée), James Bullard, le président de la Fed de Saint-Louis et membre le plus hawkish du FOMC, est venu en remettre une couche au cas où le message n’aurait pas été suffisamment bien entendu. S’appuyant sur la règle de Taylor, qui lie les taux directeurs à l’inflation et la croissance, James Bullard considère qu’une approche «généreuse» de la politique monétaire doit conduire la Fed à relever ses taux d’au moins encore un point, soit vers les 5%, tandis qu’une vision plus stricte amènerait les taux au-dessus des 7%... Le président de la Fed de Saint-Louis considère, en effet, que les hausses passées «n’ont eu que des effets limités sur l’inflation» et que les taux directeurs restent encore sous un niveau jugé suffisamment restrictif.
Si la publication des ventes au détail américaines pour le mois d’octobre a surpris à la hausse, ce qui tend à confirmer le scénario d’une économie résiliente dépeint par James Bullard, la publication, quelques jours plus tôt, de prix à la production sous les attentes semble néanmoins confirmer que la phase de baisse de l’inflation est bel et bien enclenchée. Après la dernière réunion de la Fed et la publication des derniers chiffres d’inflation, le scénario central reste, selon nous, inchangé: l’institution américaine devrait réduire son rythme de hausse des taux en continuant néanmoins de les augmenter jusqu’à 5% avant de les maintenir à ce niveau jusqu’à ce qu’elle juge son combat contre l’inflation en bonne voie.
De pic d’inflation, il n’en est malheureusement pas encore question en Europe puisque la courbe ne cesse de monter inexorablement avec, néanmoins, de fortes disparités entre les États en fonction de leur dépendance au gaz russe et des mesures de soutien budgétaires. Cependant, la publication, ce matin, de prix à la production en forte baisse en Allemagne sur le mois (première baisse depuis avril 2020 et plus forte baisse mensuelle depuis la création de l’indice) pourrait laisser augurer d’un prochain retournement même s’ils restent encore sur des niveaux très élevés.
Enfin, la situation épidémique en Chine semble se détériorer avec l’annonce de trois décès à Pékin, les premiers officiels depuis mai dernier, et plus de 24 000 nouveaux cas en 24h, ce qui a obligé les autorités chinoises à réinstaurer de nouvelles restrictions. S’il existe un risque que les assouplissements annoncés par la Chine le 11 novembre sur sa stratégie «zéro-Covid» ne tiennent pas plus de deux semaines, la Chine semble néanmoins résolue à jouer l’ouverture et à traiter ses maux (crise immobilière et volonté affichée de modérer l’impact économique de sa politique de lutte contre la crise sanitaire).