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Faut-il croire à la Finance Verte ?

En août 2021, le gestionnaire d’actifs DWS, numéro un de sa catégorie en Allemagne, a été pointé du doigt en raison des doutes qui planent à propos de ses investissements dits «verts» aux États-Unis. DWS a en effet déclaré que 459 des 793 milliards d’euros que la société gérait étaient placés sur des produits labellisés ESG.

En août 2021, le gestionnaire d’actifs DWS, numéro un de sa catégorie en Allemagne, a été pointé du doigt en raison des doutes qui planent à propos de ses investissements dits «verts» aux États-Unis. DWS a en effet déclaré que 459 des 793 milliards d’euros que la société gérait étaient placés sur des produits labellisés ESG[1]. Dans les faits, ce ne serait pas plus de 70 milliards d’euros qui seraient qualifiés d’ESG en vertu de la Sustainable Finance Disclosure Regulation[2], qui a été mise en place en juin 2021 par l’Union Européenne.

Initialement très louable, en raison de la volonté qu’ont les acteurs de la finance, réputés polluants, de participer à l’effort collectif contre le réchauffement climatique, peut-on aujourd’hui décemment faire confiance à la finance verte?

La finance verte, kézako?

La finance verte vise à favoriser la transition énergétique et la lutte contre le réchauffement climatique. Cela se traduit par le financement de multiples projets, ou d’entreprises, ayant des impacts positifs sur l’environnement. Aujourd’hui, de plus en plus de placements verts sont réalisables: obligations vertes, Green Bonds, fonds verts… Plusieurs labels ont été créés pour favoriser la transparence et offrir une meilleure visibilité à propos de ces fonds verts (fonds Greenfin, fonds ISR[3],…).

Sur le papier, la finance verte ne génère que du positif. Elle répond à des normes écologiques, tout en permettant de générer de possibles profits, réelle finalité des placements financiers. En effet, quand bien même il s’agit d’un phénomène assez nouveau, on détecte un certain potentiel d’investissement pour le futur.

Des bons usages de la finance verte

Ainsi, de plus en plus de grands groupes ont décidé d’investir dans le «vert». H&M a par exemple annoncé qu’elle allait émettre 500 millions d’euros d’obligations vertes. Chanel a déjà émis sa première dette verte, en levant 600 millions d’euros d’obligations afin de respecter ses engagements environnementaux.

Parallèlement, les banques, réputées polluantes, investissent de plus en plus afin de répondre du mieux possible à ces nouvelles normes écologiques. En sus, les grandes institutions bancaires commencent à s’entourer de spécialistes de la RSE afin de se lancer dans le financement de projets verts.

Pour exemple, Natixis, du groupe BPCE, s’implique fortement dans la transition énergétique et dans le financement des énergies renouvelables. En effet, 90% de leurs financements dans le secteur de la production électrique portent sur des énergies renouvelables.

La liste des grands groupes se lançant dans l’investissement vert se rallonge, de quoi y voir logiquement un avenir radieux à terme. Ces divers investissements doivent permettre d’apporter davantage de confiance dans ce concept assez novateur.

Cependant, la réalité n’est pas simple. Malgré le potentiel certain et l’importance que prend la finance verte, tous les éléments ne sont pas réunis pour que celle-ci ait un réel impact sur l’environnement et la lutte contre le réchauffement climatique.

De l’autre côté du miroir…

Les investissements verts représentent, en réalité, l’arbre qui cache la forêt. Publiquement, tous les groupes vanteront leurs mérites en termes d’investissements verts mais il demeure beaucoup de questions. Les grands acteurs bancaires et financiers cherchent à surfer sur la mode de l’écologie pour tenter aujourd’hui, d’attirer de nouveaux clients ou de renforcer la position de clients plus «historiques». Cela porte un nom: le greenwashing. Cependant, les actions menées derrière ne sont pas toujours fiables et peuvent amener des questions. DWS en est un excellent exemple.

De plus, les énergies fossiles représentent encore une part importante des investissements, notamment chez les banques, grâce aux profits qu’elles génèrent. La fin de ces énergies n’est pas pour tout de suite, étant donné que les projets qui sont liés avec ce type de consommables génèrent encore beaucoup de profit. Les produits dits «bruns» apportent plus de garantie financière que les produits «verts».

Par ailleurs, on estime que les premiers résultats positifs des investissements ESG aujourd’hui se verront d’ici 50 ans. Et tout bon investisseur cherchant à obtenir des retours sur investissement assez rapides, on comprend la défiance qu’il peut subsister.

Cette défiance est accrue par une réglementation qui manque de clarté sur le sujet, même si la commission européenne a commencé à se pencher dessus en 2021, et qu’elle a commencé à y apporter des réponses concrètes.

Quel potentiel pour la finance verte?

Aujourd’hui, il manque beaucoup d’éléments afin de faire réellement décoller la finance verte, sans doute par manque de coordination et d’actions concrètes, que ce soit au niveau des états et des grands groupes. La transparence sera aussi une clé pour amener vers ces investissements.

Dans les faits, pour parvenir à permettre à la finance verte de prendre plus d’ampleur, il faut pouvoir apporter des réponses concrètes à chacune des questions que de potentiels acteurs peuvent se poser: niveau de risque, fiabilité des partenaires potentiels, réglementation européenne, voire mondiale, etc…

La COP26, qui s’est déroulée en novembre à Glasgow, devait permettre d’apporter de réelles réponses sur les manières de lutter contre le réchauffement climatique. Ce grand colloque s’est terminé précipitamment avec un accord signé à la hâte en dernière minute, sans grande conviction…

Indéniablement, le potentiel de la finance verte est là. C’est désormais à chacun de prendre ses responsabilités et de mener des actions fortes pour faire en sorte que la finance verte ne soit pas qu’un écran de fumée et apporte réellement quelque chose dans les années à venir.

Arthur Marzouk Mars 2022
Notes

[1] ESG: Label qui prend en compte les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance

[2] Le 10 mars 2021, le règlement dit SFDR est entré en rigueur. Il s’agit d’un règlement à l’échelle européenne qui vise à encadrer l’intégration des enjeux sociétaux et environnementaux par les acteurs des marchés financiers

[3] Fonds d’investissement dit socialement responsable qui permet d’inveestir dans des fonds qui prennent en compte des critères financiers et extra-financiers de type ESG

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