La croissance dynamique qui avait permis a? l’Ame?rique latine de briller au palmare?s des performances par classe d’actifs entre 2010 et 2012 a aujourd’hui disparu. A l’e?poque, tandis que le monde occidental luttait pour reprendre pied apre?s le cataclysme financier de 2008, les e?conomies sud-ame?ricaines e?taient florissantes, profitant notamment d’une forte demande asiatique (Chine en te?te) pour les matie?res premie?res et les me?taux industriels. Leur croissance e?conomique reposait e?galement sur un afflux record de capitaux e?trangers, sous forme d’investissements directs et de capitaux spe?culatifs, le contexte ge?ne?ral de taux ze?ro (ZIRP*) stimulant les ope?rations de portage.
He?las, la croissance de l’Ame?rique latine e?tait trop de?pendante du supercycle des matie?res premie?res. Le continent n’a pas su se diversifier dans d’autres secteurs productifs et a manque? de mesures favorisant l’e?mergence d’une classe moyenne. La phase de croissance rapide a par ailleurs entraine? une expansion du cre?dit, contraignant les banques centrales a? resserrer leur politique mone?taire, face a? des prix a? la consommation qui commenc?aient a? de?passer les cibles d’inflation. Les e?conomies sud-ame?ricaines, notamment les habituels re?cipiendaires de capitaux e?trangers que sont le Bre?sil, le Chili et le Pe?rou, accusent aujourd’hui un ralentissement spectaculaire, qui confine a? la re?cession. Le pays le plus touche? est bien e?videmment l’e?le?phant blanc, a? savoir le Bre?sil. La re?cente re?e?lection de Dilma Rousseff malgre? le pie?tre bilan e?conomique de son gouvernement – un pays en profonde stagflation avec un PIB en recul de 1% et une inflation a? 6,75% – est peu encourageante.
La re?cession ne constitue jamais un terrain propice a? la stabilite? sociale et politique. L’Ame?rique du Sud est coutumie?re des promesses de «renouveau» non tenues et des e?lecteurs frustre?s qui descendent dans la rue pour exprimer haut et fort leur de?ception. Les investisseurs e?trangers rechigneront a? voir leurs capitaux bloque?s dans des pays ou?, lorsque le vent tourne, les de?cideurs politiques pre?fe?rent se rallier a? l’opinion publique. Il n’est donc pas surprenant de voir les investisseurs sur les marche?s e?mergents de?laisser l’Ame?rique du Sud au profit de l’Asie, ce qui accentue encore la de?gradation des balances courantes, la de?pre?ciation mone?taire et le creusement des e?carts de rendement des obligations souveraines sur l’ensemble du continent sud-ame?ricain.
Nous continuons de sous-ponde?rer l’Ame?rique latine par rapport a? l’Asie, avec quelques exceptions toutefois
S’il est trop to?t pour parler de «Sambarazo» (en re?fe?rence au «Tequilazo» mexicain de 1994 qui s’est re?percute? dans tout le continent), nous gardons le Bre?sil et ses comparses a? l’œil et continuons a? privile?gier l’Asie au sein du bloc e?mergent.
La Colombie et le Mexique font exception a? notre prudence envers l’Ame?rique latine, ces deux pays se comportant bien mieux que leurs «camaradas». La Colombie commence toutefois a? montrer des signes de surchauffe du marche? immobilier et de la croissance du cre?dit, une situation qui pourrait, a? l’instar de ce qui s’est passe? dans les pays voisins, amener la banque centrale, si trop obnubile?e par les cibles d’inflation, a? faire e?clater «involontairement» la bulle sur les actifs financiers. Le Mexique est, pour sa part, le bon e?le?ve en termes de re?formes structurelles. Afin de re?duire la de?pendance aux revenus du pe?trole, les impo?ts ont e?te? augmente?s, ce qui a agi comme frein a? la croissance des salaires. Si l’on ajoute une inflation contenue a? cette e?quation, la banque centrale peut se permettre de conserver une politique accommodante. La solide activite? manufacturie?re ame?ricaine constitue e?galement un facteur de soutien, une grande partie des exportations mexicaines e?tant destine?e aux Etats-Unis.
Enfin, s’agissant du Bre?sil, la plupart des mauvaises nouvelles semblent de?sormais inte?gre?es aux prix. Les investisseurs opportunistes devraient donc y trouver quelques placements a? haut rendement, mais aussi haut risque, notamment dans le segment obligataire.