La présidente de la BCE, Christine Lagarde, a fait de son mieux pour transmettre un message de stabilité et de continuité, mais nous avons l’impression que beaucoup de choses se passent en coulisses, certains insistant davantage sur un changement dans les mois à venir. Étant donné que les décisions les plus difficiles ont été reportées à la fin de l’été, la réunion de septembre s’annonce intéressante.
La principale information à retenir aujourd’hui était que "le Conseil des gouverneurs s’attend à ce que les achats nets dans le cadre du PEPP au cours du prochain trimestre continuent d’être effectués à un rythme nettement plus élevé que durant les premiers mois de l’année". Pendant ce temps, MmeLagarde a soigneusement évité toute discussion sur une réduction progressive des achats d’actifs, qu’elle a qualifiée de "prématurée".
La BCE a décidé de garder une "main ferme" malgré une amélioration assez significative des perspectives macroéconomiques. En d’autres termes, bien que la décision d’aujourd’hui soit conforme aux attentes du marché, elle était négative par rapport à l’évaluation des conditions économiques par la BCE.
En effet, plusieurs changements apportés à la déclaration de la BCE indiquent des perspectives plus optimistes:
- Premièrement, les projections des services de la BCE ont été révisées à la hausse pour 2021 et 2022, dans une plus large mesure que prévu (voir le graphique ci-dessous). Alors que la projection moyenne de l’inflation globale pour 2023 est restée inchangée à 1,4%, le point final (T4 2023) s’est établi à 1,5% et l’inflation sous-jacente a été revue légèrement à la hausse.
- Deuxièmement, la balance des risques pour l’activité a été officiellement qualifiée de "globalement équilibrée" pour la première fois depuis décembre 2018 (voir le graphique ci-dessous).
- Troisièmement, au cours de la conférence de presse, Lagarde a mentionné (à deux reprises) la révision à la hausse des projections d’inflation sous-jacente, à 1,3% en 2022 et à 1,4% en 2023. À notre connaissance, ces chiffres ont été inclus pour la première fois dans la déclaration d’introduction, ce qui souligne encore l’importance du signal.
Certes, ces changements sont soutenus par l’amélioration des données ainsi que par l’espoir d’une politique budgétaire plus active. Cependant, ils peuvent également être considérés comme des concessions aux faucons, ouvrant la voie à une réduction du soutien d’urgence en septembre. Si MmeLagarde a déclaré que le Conseil des gouverneurs était unanimement d’accord sur la déclaration de juin, elle a ensuite ajouté qu’il y avait eu un débat sur l’orientation monétaire conduisant à "quelques divergences de vues ici et là", notamment sur le rythme des achats de PEPP... qui était la partie la plus importante de la déclaration.
Dans l’ensemble, nous nous attendons à ce que la BCE réduise le rythme des achats de PEPP en supprimant la référence à des achats "significativement plus élevés" lors de la réunion du 9 septembre. Selon un scénario possible, les achats PEPP s’élèveraient à environ 75 milliards d’euros par mois en moyenne au troisième trimestre (compte tenu des "conditions de marché et des facteurs saisonniers"), puis ralentiraient à 60 milliards d’euros au quatrième trimestre, avant qu’une réduction progressive ne soit mise en œuvre au premier semestre 2022. Ce scénario laisserait quelque 50 milliards d’euros inutilisés dans l’enveloppe de 1 850 milliards d’euros.
Plus important encore, le Conseil des gouverneurs devrait commencer à discuter de la réduction progressive du PPA en même temps qu’il commente les résultats de son examen de la stratégie.
Nous continuons de nous attendre à ce que le PPA soit augmenté en 2022, de 20 à 30 milliards d’euros, bien que d’autres changements puissent être envisagés pour ajouter de la flexibilité aux achats du PPA, mais aussi pour revoir sa nature illimitée.
Beaucoup de choses peuvent se passer d’ici septembre, mais les récents développements macroéconomiques et de marché ont été plutôt encourageants, y compris la réaction du marché obligataire à l’impression de l’IPC américain d’aujourd’hui, ce qui suggère que les investisseurs continuent de donner à la Fed le bénéfice du doute. La BCE a cependant besoin de plus que cela - elle doit lever tout doute sur son engagement à ramener l’inflation à son objectif (symétrique) de 2%. Le chemin à parcourir est encore long.